mardi 11 décembre 2018

Un peu de propagande...


Lire l'article en pdf.

Lundi 10 décembre, Emmanuel Macron s'est exprimé à la télévision. Il a proposé des mesures en espérant faire croire qu'elles seraient suffisantes pour les gilets jaunes.

Loin d'être suffisantes, nous entendons expliquer en quoi les promesses de Macron ne font qu'aggraver la situation du peuple travailleur de France.


1- Population concernée

D'abord, remarquons qu'une partie considérable de la population n'est pas concernée par les mesures annoncées par Macron. Les chômeurs, les salariés à temps partiel, les gens à salaire légèrement plus haut que le SMIC, les retraités dont le salaire reste gelé, restent assujettis à la hausse de la CSG, ne verront pas leurs conditions de travail et de vie s'améliorer. Les miettes qu'a promises Macron à quelques uns ont pour but de diviser le salariat en donnant des micro-avantages à quelques uns. De plus ces prétendus avantages ne sont que de la poudre aux yeux, comme nous allons le voir.

Pour améliorer les conditions de travail de toutes les classes populaires, nous exigeons que le chômage soit un droit sans conditions à la poursuite du salaire entre deux emplois jusqu’à ce que l’emploi suivant atteigne au moins l’ancien salaire.

Ajoutons que les petites miettes lancées aux retraités ont clairement pour but de les appaiser avant de lancer sa réforme des retraites à points qui sera catastrophique pour l'ensemble du salariat. Nous exigeons la retraite à 55 ans pour toute la population avec poursuite du meilleur salaire de la carrière, et la retraite à 1500€ net si le meilleur salaire de la carrière n'atteint pas ce chiffre.


2- ISF et CICE

Constatons ensuite que Macron ne rétablira pas l'ISF ni ne supprimera le CICE, qui nous coûtera 40 milliards cette année.
Il invoque le fait que faire des cadeaux à la grosse bourgeoisie l'inciterait à plus investir en France et donc à créer des emplois. Nous savons que cette stratégie ne fonctionne pas depuis quarante ans. L’échec du CICE le montre bien, avec seulement 150 000 emploies créés. Cela reviendrait à payer chaque emploi créé par le CICE environ 22 000€ par mois pour l’année 2018... Or les salaires versés par les employeurs sont évidemment beaucoup plus faible. Mais où donc est passé la différence ? Pour un salaire brut de 2000€/mois, cela ferait un taux d'exploitation de 1000 %... De quoi faire trembler la tombe de Marx. Plaisanterie mise à part, il est trivial qu'il eût été plus rentable de verser directement des salaires avec ces 40 milliards plutôt que de les offrir directement à la classe capitaliste.
Mais la macronnie continue dans son aveuglement obscurantiste à croire à cette fable du ruissellement. Les faits ont beau être têtus, la macronnie refuse d'admettre leur réalité. Nous savons parfaitement que payer directement des salaires dans des emplois publics est plus efficace que d'exonérer le patronnat de payer des cotisations, car le capital n'est pas productiviste, sa seule pulsion vitale est l'auto-valorisation du capital sans limites, toujours au détriment du travail vivant. Dans son stade ultime, le capitalisme n'est plus capable de libérer les forces productives et en est une entrave. Cela se manifeste par la désindustrialisation massive de la France, de la multiplication des travaux tous plus inutiles les uns que les autres, sinon même nuisibles, ainsi que la hausse constante du chômage structurel de masse indissociable du capitalisme.
En supprimant le CICE, nous pourrions par exemple embaucher plus de 1,5 millions de fonctionnaires à 2000€ brut par mois. Il est absolument faux d'affirmer que les fonctionnaires coûtent plus cher que l’emploi privé. D'abord, c'est une contradiction dans les termes de parler du "coût du travail" : les travailleurs ne coûtent pas, puisque c'est eux seuls qui produisent la valeur économique. C'est le cas des travailleurs du privé qui en plus de produire de la valeur économique, mettent en valeur du capital, mais c'est aussi le cas des travailleurs de la fonction publique, qui produisent de la valeur économique non marchande reconnue par prélèvement sur l'économie marchande via l'impôt et la cotisation, et comptée dans le PIB en additionnant les salaires des fonctionnaires. Seul le capital est oisif et coûte cher. C'est un vampire dont l'essence est d'aspirer la substance vitale du travail à partir d'accumulation morte de travail vivant déjà aspiré, et qui est d'autant plus assoiffé de substance vitale du travail qu'il grossit. Nous revendiquons que le produit du travail vivant reviennent aux travailleurs et non aux oisifs parasitaires : se passer des capitalistes et verser directement du salaire aux travailleurs qui, seuls, produisent.

Par ailleurs, Macron a peur que la grosse bourgeoisie fuie la France et craint que cela ne bloque toute la production française. C'est parce qu'il a une vision obsolète de l'économie. Si les capitalistes fuient la France, c'est une bonne nouvelle pour nous autres travailleurs. Nous n'avons pas besoin d'actionnaires, ni de prêteurs, ni de grands patrons, pour produire. Si les actionnaires ou les patrons veulent quitter le pays ou vendre leurs entreprises françaises, nous exigeons le droit de préhemption immédiate par les travailleurs eux-mêmes. De plus, nous revendiquons que seules les entreprises appartenant à leurs salariés aient droit aux marchés publics. L'avantage serait double : non seulement les travailleurs seraient motivés par leur travail concret et non pas seulement par leur salaire, puisqu'ils auraient la maîtrise de ce qui est produit, mais en plus, la production elle-même coûterait moins cher car il n'y aurait plus de parasites onéreux à payer : actionnaires, banquiers, grands patrons.
Les capitalistes ont besoin des travailleurs pour s'enrichir, mais les travailleurs n'ont pas besoin des capitalistes pour travailler.



3- SMIC et salariat

Ensuite, Macron a dit qu'il reconnaissait l'insuffisance du service public. Mais “en même temps”, il annonce que la hausse du SMIC ne coûtera pas un euro aux employeurs. Cela signifie que le salaire brut n'est pas augmenté et qu'une partie des cotisations sera supprimée et transférée dans le salaire net, donc notamment que les services publics associés à la santé, au chômage, et à la vieillesse, verront leur budget diminuer. Par conséquent la qualité de ces services publics va baisser, et pourra ainsi justifier leur privatisation, comme cela s'est déjà produit pour la téléphonie et la SNCF. Les 100€ gagnés dans le salaire net, il faudra les reverser immédiatement soit dans l'impôt, soit pour payer des compagnies privées qui se seront approprié les services publics que l'État ne pourra plus payer. Cette mesure donc, est au mieux inutile, mais en réalité rendra la production du service public beaucoup plus difficile. Car non seulement son budget sera diminué puisque le prélèvement immédiat sur l'économie marchande pour le service public à travers la cotisation salariale sera diminué, mais en plus les parties du service public concernées par ces cotisations verront une partie de la baisse des cotisations compensées par un versement des caisses de l'État, ce qui signifie que l'ensemble du service public verra son budget diminuer -- ou au mieux, payé directement par le contribuable par une hausse des impôts. Cela montre bien que la hausse du SMIC proposée par Macron n'est en aucun cas un avantage pour les classes populaires.

Il en va de même pour les primes promises aux bas salaires, qui "ne coûteront pas un euro aux employeurs". Elles seront donc encore une fois payées directement par le contribuable via l’impôt et non par le capital. D'abord, remarquons que, les primes n'ayant rien d'obligatoire, cela obligera les travailleurs à faire du zèle et à cirer les pompes de leurs employeurs pour que ceux-ci daignent leur céder quelques miettes supplémentaires à la fin de l'année, rendant au passage leurs collègues jaloux.

Globalement, toutes les mesures seront payées par les contribuables et non par le patronnat. C'est se bercer d'illusions que de croire que les mesures annoncées par Macron vont améliorer la condition de la classe travailleuse.

Nous revendiquons la hausse générale de tous les salaires bruts, ainsi que leur indexation sur le taux d'inflation. Nous exigeons également une baisse du temps de travail à 30h par semaine et 25h pour les métiers pénibles. Nous exigeons que les heures supplémentaires se voient accompagnées du double des cotisations des heures normales.

En plus de l'augmentation du salaire brut et net, nous exigeons une hausse du taux de cotisation pour renforcer le budget du service public.

Le salaire brut est le seul salaire qui, lorsqu'il augmente, améliore la condition de la classe travailleuse toute entière. Les cotisations reconnaissent par ailleurs la valeur économique non marchande de grandes productions comme la santé, qui ont commencé à instituer une pratique non capitaliste du travail, et qui fonctionne infiniment mieux que lorsqu'elle est privée. Le mécanisme qui rend ces secteurs efficace est la socialisation immédiate de la valeur à une grande échelle au moment où elle est produite, et marque les prémisses de la victoire à l'oeuvre du communisme, mouvement réel de l’abolition des rapports de production capitalistes existants et son remplacement par une production dont le caractère déjà largement social n’est pas aliéné par l’appropriation privée du travail. Le secteur de la santé est mille fois plus efficace lorsqu'il fonctionne de façon socialisée, sans actionnaires, sans prêteurs, sans patrons capitalistes, et sans gouvernement libéral pour le saboter.


4- L'arnaque de la défiscalisation des heures suplémentaire.

Macron nous a proposé de défiscaliser les heures suplémentaires. Une idée qui nous rappelera le bon vieux temps de Sarkozy, et son fameux "travailler plus pour gagner plus". Avec cette proposition, Macron nous dit que si on ne gagne pas assez pour vivre convenablement, nous n'avons qu'à faire des heures supplémentaires. Mais ce n'est pas ce que nous voulions. Nous voulions une augmentation générale des salaires.
Il y a pire : non seulement cette proposition ne correspond pas à nos attentes, mais de plus elle est une nouvelle attaque contre les plus pauvres.
En effet, quels seront les effets d'une telle mesure ? D'abord, du point de vue des travailleurs. Les salariés au SMIC pourront plus facilement compléter leurs revenus avec des heures supplémentaires, certes. Mais cela incitera également les patrons à moins embaucher, aggravant ainsi la précarité et le chômage et augmentant les effectifs de l'armée de réserve du prolétariat.
Du point de vue du patronnat maintenant. Certes, cette mesure est un petit coup de pouce aux PME, qui ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. Mais c'est surtout un énorme cadeau aux très grosses entreprises : TOTAL, RENAUD, etc... bref à la grosse bourgeoisie. Et ce gros cadeau aux gros bourgeois sera financé par la baisse des cotisations, c'est à dire par les hôpitaux et les retraites. Cela veut dire de nouvelles attaques contre les retraités et la santé dans les prochaines années.

Pour résumer, Macron nous dit "Je vous ai compris gilets jaunes, je vais prendre aux vieux et aux malades pour le donner aux riches." Avec cette proposition, Macron nous prend pour des abrutis, pour des illettrés, pour des moins que rien. Il prétend s'excuser, mais en vếrité il nous méprise toujours autant.

Obliger les salariés à travailler pendant des heures supplémentaires pour pouvoir vivre normalement intitutionnalise le grand nombre d'heures de travail dans l'entreprise. En plus de rendre la vie des travailleurs plus fatigante, cela augmente l'exploitation du travail vivant en allongeant le temps de travail. Avec la productivité actuelle, nous pourrions travailler beaucoup moins longtemps par semaine et subvenir aux besoins de tous : en effet, la France n'a jamais été aussi riche. Avec le développement présent des forces productives, rien ne justifie l'obligation des heures supplémentaires pour que les travailleurs puissent avoir une vie digne. Cela ne peut signifier qu'une chose : la classe bourgeoise s'approprie encore plus le produit du travail de la classe laborieuse que lorsqu'elle n'obligeait pas les travailleurs à recourir aux heures supplémentaires pour subvenir à leurs besoins.

Nous revendiquons la semaine de 30h et de 25h pour les métiers pénibles.


5- De la violence

Macron a commencé son discours en accusant les violences des manifestants. Il n'a jamais parlé de la violence de l'État ; il y a beaucoup plus de blessés et même de morts du côté des gilets jaunes que du côté de la police. Le rôle de l'État, lorsqu'il est contrôlé par la bourgeoisie, est de maintenir l'état des rapports de production capitaliste, quitte à user de violence. Du point de vue de la bourgeoisie, l'État détient le monopole de la violence légitime car il sert objectivement ses intérêts de classe. Cela peut être amené à se transformer si le prolétariat se saisit du pouvoir de l'État, comme ce fut le cas par exemple avec la Sécurité Sociale ou le droit du travail institué. Quoiqu'il en soit, l'État, lorsqu'il est contrôlé par la bourgeoisie, ne reconnaîtra jamais la violence révolutionnaire comme étant légitime. Mais surtout, la bourgeoisie ne parlera jamais de la violence instituée du capitalisme, de la misère qu'il engendre et des nombreuses morts qu'il provoque silencieusement. Lorsqu'un gros-bourgeois entre chez lui paisiblement et embrasse ses enfants dans son château, il a en réalité sur les mains beaucoup plus de sang qu'une personne désespérée qui prend les armes parce qu'elle n'a plus rien à perdre que ses chaînes.

Macron a dénoncé la violence des manifestants, mais qu'en est-il de la police qui est de plus en plus armée, qui n'hésite pas à tirer quasiment à bout portant avec des flashballs sur des manifestants pacifiques qui lèvent les mains ? Qu'en est-il des grenades lancées en cloche pendant les manifestations ? Qu'en est-il des blindés qui furent déployés à Paris ? Qu'en est-il du déploiement de l'artillerie légère samedi 8 décembre ? Lorsqu'on demande qui a été violent entre la police et les gilets jaunes, nous répondons sans hésiter : l'État dirigé par Macron.

Mais peut-être que ce qu'ils appellent "violence", c'est de venir avec une trousse de secours pendant les manifestations ? Depuis peu, le sérum physiologique, les masques à particules fines, ainsi que les lunettes de piscine, maigres protections face à la répression totalement abusive des forces de police surarmées, sont interdites dans les manifestations et peuvent désormais servir de prétexte à arrestation. Non seulement la police est violente, mais refuse que nous nous soignions lorsqu'elle nous aggresse -- souvent gratuitement et abusivement.

Nous exigeons la dépénalisation des moyens de protection élémentaires : les manifestants doivent être autorisés à porter des masques à gaz, des lunettes de protection, ainsi que des trousses de secours contenant notamment du sérum physiologique.
Nous exigeons de plus un désarmement de la police lors des manifestations : suppression du gaz lacrymogène (déjà interdit par l’ONU), suppression des grenades de toutes sortes, suppression des flashballs.


6- Légitimité de Macron

Macron a parlé de liberté dans son discours. La bourgeoisie adore parler de liberté quand elle ne concerne que sa classe et pas celle des travailleurs. Où est la liberté d'expression lorsque des milliers de manifestants n'ont pas eu le droit de se déplacer à Paris via des places de train qu'ils avaient payées sous prétexte qu'ils voulaient exprimer leurs opinions politiques ? Où est la liberté d'expression lorsque les centrales syndicales sont menacées de poursuites judiciaires par le gouvernement si elles appellent à rejoindre les revendications des gilets jaunes ? Où est la liberté du travailleur lorsque le manque de moyens matériels induit par la baisse des salaires pousse à la colère, à la violence, et parfois même au suicide ? La liberté que promet Macron n'est même plus celle du renard dans le poulailler, c'est celle du crocodile au milieu de poussins. La liberté du capitaliste d'exploiter à outrance un prolétariat enchaîné et muselé.

La véritable liberté viendra de la libération de la classe travailleuse, nous assisterons à la libération du travail de son carcan capitaliste, de la libération des forces productives grâce à la socialisation des moyens de production. Alors, la liberté sociale du travail se traduira par la liberté des individus producteurs conscients de la production sociale de leur existence. Cette liberté de la classe travailleuse est antagonique de la liberté bourgeoise proclamée par Macron, elle est irréconciliable. Alors se dévoile explicitement la lutte entre les deux classes aux intérêts contradictoires : bourgeoisie et prolétariat.

Élu dans un contexte inédit, nous assistons depuis plus d'un an au midi de l'hubris d'une classe dominante déboutonnée, violente et sûre d'elle même. Orgueilleuse, elle reconstruisit méthodiquement le récit d'une élection triomphale, faisant du vote du second tour la légitimité d'une politique qui avait justement produit ce second tour. Méprisante, elle multiplia les provocations, afficha fièrement sa suffisance. Cynique, elle commença le travail de destruction des conquis du travail assisté d'un régiment de députés petit-bourgeois, petit-patrons et membres du salariat d'encadrement. Jamais, cette classe odieuse n'eut la sagesse, aprés cette présidentielle hors-norme de prendre la mesure de ce qui s'était passé. Jamais, elle n'a montré la moindre hésitation, la moindre remise en question. Elle poursuivi la même politique avec plus de violence encore. Nous en tirons les conséquences logiques : ce pouvoir est un ennemi des travailleurs. Là pour servir les interêts des siens, là pour augmenter les taux de profits des parasites capitalistes. Ce pouvoir n'est pas celui d'une conciliation de classe, ce pouvoir est celui de l'organisation bourgeoise contre le salariat.

Pour conclure, Macron n'a rien promis d'inédit, il a juste tiré des mesures de son programme qui sonnaient justes dans l'instant, mais qui en réalité sont fausses. Il a dit qu'il tirait sa légitimité de nous, ce qui confirme son aveuglement face à la colère populaire. Nous exigeons la démission de Macron, de son gouvernement, ainsi que de tous les députés du parti LREM.



Le mouvement des gilets jaunes ne doit surtout pas se laisser prendre par ces micro miettes en putréfaction que nous a promises Macron. Nous devons réagir à ce discours par une intensification et une radicalisation croissante du mouvement des gilets jaunes. Allons tous manifester le samedi 15 décembre !